Je me sens incapable de parler, de lui répondre, je suis perdu, les larmes débordent de mes yeux et m'étouffent, impossible de les retenir.
Avec étonnement, je réalise que mon désespoir les surprend. La Présidente tente de me rassurer, mais je sens que ma vulnérabilité la déstabilise. Dans ce tribunal de commerce, ma situation est banale.
Pour ma part, c'est une mort, un monde qui s'effondre. Quarante ans de vie disparaissent dans une procédure qui condamne des entreprises, souvent victimes d'un banquier et d'une administration sans conscience.
Le personnel est licencié et doit quitter l'entreprise. L'accès aux locaux nous est interdit, tous les éléments appartiennent désormais au liquidateur judiciaire.
Je pense à mes employés, à leurs visages, à leurs familles. Circulez, il n'y a plus rien à voir.
Tel un fantôme, comme un fugitif, vedette déchue, je quitte discrètement famille et amis, maison et souvenirs.
La Lamborghini dans le parking de l'hôtel est le symbole des succès et de la fragilité de ceux-ci.
Détresse, mère de tous les doutes, dis-moi ce qui nous définit vraiment, nos succès ou nos échecs ?
Curieusement, me reviennent les mots d'un auteur dont je ne retrouve pas le nom :
La force d'un homme se mesure dans sa capacité de se relever quand il tombe.
Cette phrase veut-elle me dire que si un homme n'est jamais tombé, comment peut-il prétendre être fort ?
L'échangeur d'Orange est à 70 km, il me reste 30 minutes pour faire un choix, l'Italie et ses horizons peuplés de souvenirs ou l'Espagne et l'inconnu.
La Camarde Noire barre à droite, au vent mauvais.
— Pourquoi m'as-tu abandonné à ce cadavre décharné, quelle est l'erreur que je n'aurais pas dû commettre ?
Tu m'as toujours remis sur le droit chemin lorsque je m'égarais, tu étais là pour corriger mes erreurs et guider mes pas.
Tu m'as abandonnée alors que je t'utilisais avec parcimonie, pourquoi es-tu partie quand j'avais tant besoin de toi ?
Toi, force sans nom, qui pourvois à mes besoins et me protège depuis ma naissance. Tu m'as ouvert toutes les portes, grâce à toi, j'ai repoussé mes limites et réalisé mes rêves.
Chance, pouvoir ou providence, peu importe ton nom, présence discrète et constante que j’invoque rarement et remercie toujours.
Comment vais-je exister, qui saura m'apprendre à vivre ?
C'était hier.
En dix ans, rien ne s'efface, rien n'est jamais perdu.
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Lorsque nous sommes confrontés à une chute, un événement bouleversant qui ébranle nos existences de manière brutale et inattendue, il est possible de considérer cette épreuve comme une étape nécessaire et inévitable de notre parcours.
À certains moments de nos vies, la seule façon de progresser et de se retrouver consiste à faire table rase, à remettre en question chaque aspect de notre existence pour construire un nouveau parcours.
Ce que vous tenez entre vos mains n’est pas un roman, même si certaines scènes sont romanesques. C’est un témoignage brut, sincère, parfois maladroit, mais vrai.
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